Une journée parmi les zombies

 

Samedi dernier, le Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg (FEFFS pour les intimes) organisait sa désormais traditionnelle Zombie Walk. J'ai tenté de taper l'incruste chez les morts-vivants.

"Vous êtes là les zombies ???" Chapeau ensanglanté sur la tête, visage de cendre, le meneur de troupe toise du regard ses ouailles. "Vous êtes là ???" Un beuglement lui répond. Des bras décharnés se lèvent vers le ciel gris. C'est le moment. Je descends de la statue du général Kléber - où un orchestre zombie improvisé s'est formé - et, ni vu, ni connu, fond dans la foule. Me hisse sur la pointe des pieds. Et contemple le désastre.

A quelques mètres de moi, ils sont des centaines à se presser...pour devenir des zombies. A chaque fois, c'est la même rengaine : une femme - ou ce qu'il en reste - lève une main ensanglantée, puis un humain se précipite vers elle. Elle agite ses pinceaux, et, 2 minutes plus tard, un zombie en ressort. Je tente de crier, de hurler aux gens de faire demi-tour. Mais la foule me compresse, m'étouffe, et mes protestations restent bloquées dans ma gorge. Heureusement, ils sont nombreux à avoir grugé les morts-vivants. "C'est de la confiture et du chocolat", me souffle un pote en me montrant son visage tuméfié.

Soudain, la foule se met en branle. Le cortège est parti. Sur son passage, les gens s'écartent. S'enferment dans leurs boutiques. Les zombies titubent. Hurlent. Grognent. L'un d'eux se tourne, menaçant, vers un de ses amis : "Et toi, t'as trouvé un coloc' ?" Ouf, c'est aussi un faux. Les morts-vivants se dirigent vers la cathédrale. Certains me repèrent. A chaque fois, je me cache, le souffle court, attendant que le zombie reparte. Shaun of the Dead est bien là, mais il semble trop occupé à pavoiser pour faire quelque chose.

Les zombies s'arrêtent un moment. Puis repartent, cahin-caha. Qu'est-ce qui pousse tous ces morts-vivants à se comporter ainsi ? Je décide de continuer à les suivre pour savoir. Dans la foule immense, je repère des mariées décédées, des hommes des cavernes zombéifiés, des chirurgiens au teint livide, et même ce type d'un film d'horreur dont on ne se rappelle jamais le nom. 

Enfin, les zombies semblent ralentir. La place de la Bourse... Serait-ce enfin l'endroit que cherchaient les morts-vivants ? Soudain, ils se mettent à courir, vont chercher des tickets pour une tarte flambée, se ruent aux stands de boissons, se mettent à danser frénétiquement sur de la musique techno, huent Shaun, élisent leur Miss et Mister Zombie, et rigolent à pleines dents pourries. En réalité, le zombie est comme nous : tout ce qu'il veut, c'est faire la fête. Et, quand il se met à pleuvoir à verse, se réfugie où il peut. Comme nous, on vous dit.

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